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THE AUTHOR
An artist [ poetry, plays, short stories, painting and sculpture]. [June 2014]
AUTHOR'S OTHER TITLES (5) Florence (Short Stories) A rather banal love story. [762 words] L'Arbre Amoureux (Foreign) Quatre poèmes en prose: L'arbre amoureux. Le rouge-gorge. La descente aux enfers. L'arbre à chandelles. [752 words] Le Mystère De La Lune (Foreign) (Conte mauricien) [French]. [722 words] L'Homme Cloué (Foreign) Deux écrits de "La maison des Ombres": L'homme cloué. L'homme qui doutait. [704 words] Pandora's Box (Plays) The play is about the unforeseen hazards of genetic research. [6,896 words]
Conte De Noël Gérard Ducasse
<<Je vous demande bien pardon, monsieur. Je choque sans doute vos sensibilités. Je vous comprends très bien. Vous avez une idée bien ordonnée du monde, que je dérange, parceque je suis athée.>>
Le monsieur d'en face de moi, avec qui je causais ainsi à l'écart de la compagnie, lors d'une réception de noces, me regarda d'un air de dégoût. Sans doute, voulait-il abréger cette conversation déplacée_ mais aussi, pouvait-il abandonner le terrain à un être évidemment dépravé et moralement son inférieur?
<<Voyez-vous>>, lui dis-je << je ne puis comprendre la notion de Dieu..comment donc, puis-je y croire?>> La gorge me serrait un peu. Je l'étanchais d'un peu de vin.
<<Vous comprendriez la notion de Dieu, ...si vous y mettiez un peu d'humilité...>> et après un silence,<< peut-être.>> me dit-il.
Ce que j'avouais alors, je ne l'ai jamais avoué. Je n'aurais jamais du le faire, surtout pas à cet homme.
<<Me croiriez-vous>> lui dis-je, <<si je vous disais que tout pauvre athée que je suis.... si je vous disais que le Christ m'est apparu à moi, pauvre crétin...>>
Le monsieur qui portait des lunettes à demi-cercle dorées, a failli les perdre sous le coup du choc. Après avoir rajusté ses lunettes sur son nez, il les a ramenées vers le bas pour bien me voir de près. Il a pris un air soulagé. Il se disait, sans doute, le pauvre diable << Ce type-là est timbré, laissons-le parler, il pourrait être amusant>>. Il a souri d'un petit air fin. << Cela a du être une expérience capitale! mais racontez-moi cela, cher ami.>> Moi, son ami! Je l'ai regardé, et le vin aidant, je lui ai raconté mon histoire.
<< C'était en 1960, dans la ville de Dublin, la veille de Noël. La vieille ville résonnait du carillon des cloches. La foule remplissait les rues, menant à l'église paroissiale. Je la voyais passer devant ma fenêtre. Ce chant de cloches vibrant dans la nuit, me ramenait à mes années de prime jeunesse, quand, enfant de choeur en soutane rouge et surplis blanc, je servais la messe... Qu'ils étaient doux les mots qui me revenaient...Agnus dei qui tollis peccata mundi, miserere nobis.>>
<<Vous parlez le latin de cuisine, mon pauvre ami...>>observa le monsieur aux lunettes.
<<Et puis encore,>> je repris, sous l'effet de la nostalgie,
<< Domine, non sum dignus ut intres sub tectum meum; sed tantum dic verbo et sanabitur anima mea>>.
<<Voilà ce qui me revenait de ces années de croyance heureuse. Il me semblait, à voir passer ces gens dans la rue, que je me revoyais moi-même à travers la distance des annnées et les mutations de l'âme...>>
<< Le vin vous rend philosophe>> observa-t-il, entre deux petites gorgées.
<< Voilà ce que je ressentais >> lui dis-je << en voyant passer ces gens dans la rue, ce 24 décembre alors que les cloches chantaient à toutes volées; mais je ne pouvais me joindre au festin, car j'avais perdu cette foi qui rassure et qui réchauffe. Je connaissais la terrible nuit de l'âme sans Dieu>>.
<<Tant pis pour vous>> me dit-il.
<<Je restais accoudé à ma fenêtre>> dis-je. <<Dehors, une fine neige commençait à tomber. Les trottoirs se vidaient à mesure que minuit appprochait. Bientôt la rue fut déserte. Là-bas, au bout de la chaussée, je pouvais voir la masse sombre du clocher. Le vent s'était levé, et de temps en temps, des rafales m'apportaient des bribes de cantiques de Noël. Je me sentais si seul, étudiant étranger dans une ville froide, sans âme que je connaisse...
Et pourtant cela n'était pas vrai. J'avais un camarade en ville; mais la semaine d'avant, nous nous étions brouillés. Ma solitude était insoutenable; je n'en pouvais plus. J'adossais mon <<dufflecoat>>, sorte de manteau en serge épais, muni d'un capuchon, et sortis . J'étais décidé à me reconcilier avec mon copain. J'avais besoin de parler à un être humain, de rejoindre la famille des hommes. Les rues étaient sombres. Le vent fouettait des flocons de neige sur mon visage. Je pensais à la tasse de café que nous allions boire ensemble. Cette image résumait pour moi ma participation à la communion des hommes. Arrivé à sa porte, j'y cognais sans succès. Il n'était point là. Cette absence me jeta dans un profond abattement. Il me semblait que la grande famille humaine me rejetait. Le coeur serré, les sanglots me montant dans la gorge et aux yeux, je repris le chemin vers ma demeure. Déjà les gens revenaient de la messe. Dieu venait de naître, mais pas pour moi. Dieu venait sauver le monde , mais non moi. Je marchais dans le sens inverse de la foule, et il me semblait que tous, ils regardaient couler mes pleurs. Pour échapper à ce malaise, j'entrais dans un vieux café sale encore ouvert, et demandais une tasse de café. Je prenais une première gorgée quand il vint s'asseoir à ma table. Il était mal rasé. Il était aussi sale que l'endroit et sentait le poisson...>>
Le monsieur à lunettes fit la moue. Il n'aimait pas les gens qui sentent mauvais ou peut-être qu'il n'aimait le poisson.
Pourquoi donc fallait-il que je continue mes confidences à cet homme déplaisant qui me prenait sans doute pour un cinglé et qui me regardait d'un air las, les yeux mi-clos derrière ses verres à demi-lune? Mais je continuais quand même.<< Je disais donc qu'il sentait fortement le poisson. Cela ne m'étonnait guères. C'était sans doute un pêcheur revenant vendre sa prise du marché.
<<Tu te crois bien seul>> me dit l'homme mal rasé.
<<Oui , je suis bien seul>> répondis-je.
<<Et pourtant, je suis toujours à tes côtés.>>
C'est alors que je le reconnus. Il se pencha vers un sac qu'il avait posé par terre et en sortit des petits dorés et tout chauds qu'il arrangea dans une assiette entre nous. Je partageais ce repas avec lui. Une joie immense m'inondait. Je voulais lui parler, lui dire merci, mais je n'y parvenais pas. Il s'est levé. Il a mis sa main sur mon épaule ; et puis il est parti.>>
Le monsieur à lunettes m'a regardé d'un air amusé; << C'est ravissant tout ça. Il ne vous reste plus qu'à croire>>. Il a ajusté ses lunettes sur son nez, et il s'est mis debout...<<Charmante conversation!>> m'a-t-il dit dit en me quittant
Je le détestai, je me détestai. Et puis j'ai pris une petite gorgée de vin...<<sed tantum dic verbo, et sanabitur anima mea.>>
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